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  • Photo du rédacteurAline Savard

L'Écriture, avec un grand É

J'vous ai dit que j'avais mis les cahiers d'exercices dans une boîte. Mais je ne vous ai pas dit pourquoi je l'avais fait. Et les retombées de ce geste symbolique. Alors laissez-moi vous raconter.


C'était ma deuxième année à cette école en milieu défavorisé. À la fin de l'année d'avant, quelqu'un avait décidé qu'on travaillerait avec ça. J'étais jeune, ouverte à l'essaie. Voilà que mes 18 élèves arrivent dans ma classe de 1ière année. Mais après un mois, je me sentais complètement incompétente... Alors que quelques élèves arrivaient à suivre le rythme, les autres peinaient à trouver leur crayon et à répondre aux exigences des premières pages. Sérieusement, je pleurais tous les soirs. J'avais beau user de tout, incluant l'enseignement à trois; moi, l'orthopédagogue et l'orthophoniste, mes élèves étaient toujours aussi perdus, et moi aussi. Et je ne vous parle pas de la démotivation qui régnait en classe, y compris moi. Remise en question totale: voilà où j'en étais.


Et puis, tel une bouée de sauvetage, j'ai vu passer une publicité sur un congrès de l'AQEP

autour de l'écriture et de la lecture. Je n'ai pas hésité, j'ai sauté sur l'occasion. J'avais besoin de me trouver des moyens d'y arriver, des personnes ressources. Tout ce qui pourrait m'aider. Et j'y ai rencontré pour la première fois Yves Nadon et Jocelyne Pronovost, des « pionniers » au Québec, inspirés tous les deux par différentes recherches chez nos voisins américains dont celles de Cunningham et Allington. (J'utilise les guillemets pour le mot pionnier car j'apprendrai, plus tard, que les vrais pionniers au Québec en écriture libre, ce sont les enseignants Freinet.)


Aussitôt revenue de ce congrès, j'ai mis tous les cahiers d'exercices dans une boîte. J'ai acheté des duo-tang, fait imprimer différents formats de papier et hop! L'Écriture (libre) est arrivé dans ma classe.


Chaque enfant écrivait, pour vrai, chacun à sa mesure. Et j'ai vu un changement radical dans l'atmosphère de ma classe. Mes élèves étaient enfin bien, et moi aussi. Et ils évoluaient. J'ai appris à ce moment-là à leur faire confiance. À avoir confiance au potentiel de chaque enfant, quel qu'il soit. Et de regarder leur apprentissage via leur propre progression, dans leur regard à chacun, dans leur propre programme, comme le dit si bien Papert (1981).


Dans les années qui ont suivi, j'ai persévéré, suivi différentes formations, en me sentant toujours un peu « différente », jusqu'à ce que j'arrive dans une école Freinet où tous les enfants écrivaient des textes libres. À ce moment, je me suis senti un peu comme chez-moi. Je n'étais plus seule. Non seulement je pouvais voir l'évolution des jeunes enfants dans ma classe, mais je pouvais y voir l'évolution à travers les années grâce à la constance dans cet outil Freinet si puissant. Je suis passé de l'écriture libre au texte libre, j'ai poursuivi ma formation pour cet outil, et je la poursuis encore aujourd'hui.


Ça fait maintenant 20 ans que mes élèves apprennent à écrire, pour vrai. Écrire à partir de ce qu'ils sont, de qui ils sont, de ce qui les intéresse et en suivant leur propre rythme. Moi je fais quoi? Je m'émerveille. Tous les jours. Depuis 20 ans. Il faut surtout croire au potentiel de chacun. Et se (leur) donner cette liberté.






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